Cultiver la confiance en soi, une question d'environnement ? â Rencontre avec MĂ©lanie
Une Ă©dition oĂč l'on parle natation (pour de vrai)
Cher·es habitué·es du bassin : whalecome back et merci dâĂȘtre ici !
Aux newbies qui ont rejoint le swimming club â soit, cette lettre numĂ©rique â ces derniĂšres semaines : whalecome đđŸââïž
Dans cet espace, on plonge ensemble de maniĂšre randomadaire Ă lâintersection entre le sens, lâimpact (socio-Ă©cologique) et lâinclusion. Pour ce faire, on file la mĂ©taphore de la natation pour parler du monde dans lequel on essaye de trouver sa place (aka, sa ligne de nage).
Si besoin, tu peux consulter ce lexique natatoire pour tâaider Ă la naviguer.
Oyez oyez (câest la criĂ©e) :
Je cherche un·e sponsor pour la Ploufletter. Si tu veux faire connaßtre ta marque / produit / service ou event à de chouettes personnes : travaillons ensemble.
Si ça tâintĂ©resse, tu peux rĂ©pondre Ă ce mail. (Je suis aussi joignable par mouette voyageuse.)
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Sur ce, bonne sĂ©ance đ
đŁ au programme
Ădit'eau
Entretien-fleuve avec Mélanie Dinane
Quelques ressources pour aller plus loin
Attention, cette édition est (trÚs) longue et sera coupée avant la fin. Swim par ici pour la consulter dans ton navigateur
đ Ă©ditâeau â keeping it short
Temps de lecture : 1min
Coucou toi, comment vas-tu ? JâespĂšre que le retour du printemps illumine tes journĂ©es (et tes sorties piscine) !
Ici, jâexplore les abysses. Jâai commencĂ© une nouvelle mission de production et gestion partenariale comâ il y a deux semaines et demi. Le temps de tout prendre en main la fatigue devrait passer. (Enfin, j'espĂšre.)
Quoiquâil en soit, pour le moment : « on est là ».
Sache que pour me soulager je me repose sur deux choses 1/ les micro-siestes et la grasse matâ le week end 2/ les romans dâapprentissage ou dâanticipation jeunesse. (Et franchement, ça du bien !)
Enfin bref, passons. Je me suis promis de faire rapide parce que lâĂ©change dans lequel tu vas plonger est plutĂŽt long. (Tu peux retirer le « plutĂŽt » de ma phrase.)
Aujourd'hui, on parle âŠ. confiance en soi.
Letâs dive in !
Je te laisse, see you en fin dâĂ©dition.
Apolline đ
đ aie confiance, crois en toi
Temps de lecture : 20min
Mai 2018. Je suis en vacances avec des potes, allongĂ©e de tout mon long sur un transat. Le tĂ©lĂ©phone sonne : « Je tâappelle pour [insĂ©rer nom dâentreprise]. Je suis ravie de tâannoncer que tu es sĂ©lectionnĂ©e pour le bootcamp. » Su-per.
Je maudis intĂ©rieurement mon moi de janvier qui a dĂ©cidĂ© de postuler Ă ce concours Ă©tudiant avant de planifier mes vacances. Jâai tellement la flemme de me dĂ©placer que mon interlocutrice finit par me demander si tout va bien. Tant pis pour lâopportunitĂ©âŠ
⊠Me voici donc deux semaines plus tard de retour en France, valise Ă la main, prĂȘte Ă passer ces 3 jours avec le reste de la promo. (Et oui, jâai capitulĂ©.)
Au moment du tour de table introductif, le constant est flagrant : la diversité est quasi-inexistante. Et en fond, surgit la question suivante : « Est-ce que je fais partie de leur quota ? ».
Flashforward to 2022.
Je commence un contrat dans une nouvelle structure. Petit stress, mais tout semble bien se passer. Une fois rĂ©union dâaccueil terminĂ©e, ma voisine se tourne vers moi et me lance : « Câest toi ou tes parents qui sont venus en France ? », comme si ma prĂ©sence dans cet Ă©cosystĂšme Ă©tait inattendue.
Suite Ă cet Ă©change, je recommence Ă mâinterroger sur ma lĂ©gitimitĂ© Ă occuper certains espaces â et la place qui mây est rĂ©servĂ©e.
Et en parlant de placeâŠ
Jâai mis des annĂ©es Ă changer de formulation entre « trouver ma place » vs. « la prendre ».
Bon, tu lâas compris, la confiance en soi, câest un work in progress1. Alors, pour mâaider Ă comprendre ses origines et ses leviers, je suis allĂ©e rencontrer quelqu'un qui a grandit dans un environnement (familial et social) propice au dĂ©veloppement dâune confiance en soi inĂ©branlable.
Jâai nommĂ© : MĂ©lanie Dinane.
Comme la plupart des personnes dont tu as pu lire le portrait, jâai rencontrĂ© MĂ©lanie sur le rĂ©seau quâon aime tous·tes dĂ©tester ; jâai nommĂ©, Linkedin. Ă lâorigine, je cherchais simplement Ă Ă©changer avec quelqu'un de son ancienne structure.
Et, en discutant ensemble :
đđŸââïž Du rĂŽle que jouent les reprĂ©sentations sur notre imaginaire ;
đđŸââïž De son parcours de nage entre la Guyane et Paris ;
đđŸââïž De sa vision de lâinclusion dans la tech ;
đđŸââïž Et de confiance en soiâŠ
âŠOn sâest dit que ce serait super chouette de pouvoir te partager une partie de ce patchwork conversationnel.
Un check de calendrier plus tard, le rendez-vous était pris pour enregistrer.
De la mĂȘme maniĂšre quâavec Anissa, MĂ©lanie mâa fait redĂ©couvrir lâimportance dâaborder nos parcours Ă la maniĂšre dâun iceberg. Ce qui importe le plus, câest les 7/8Ăšme invisibles Ă lâĆil nu.
Pour illustrer cette mĂ©taphore arctique, MĂ©lanie a commencĂ© par me raconter lâhistoire de sa famille (nageuse), et plus prĂ©cisĂ©ment, de son pĂšre.
Originaire de La DĂ©sirade en Guadeloupe, celui-ci a fait ses premiĂšres brasses dans lâocĂ©an. Un coup de palme en entraĂźnant un autre, M. Dinane sâest lancĂ© dans la compĂ©tition locale, rĂ©gionale, et (inter)nationale. Ces Ă©preuves ont participĂ© Ă lui forger un mental en acier â dont MĂ©lanie semble avoir bien hĂ©ritĂ© !
Comme pour beaucoup dâathlĂštes, lâhistoire retient son palmarĂšs final. Pourtant, ce sont ses annĂ©es dâentraĂźnement prĂ©cĂ©dentes qui ont Ă©tĂ© capitales.
Alors, plutĂŽt de se concentrer sur le 1/8Ăšme visible de lâiceberg du parcours de MĂ©lanie, je te propose aujourdâhui de plonger en dĂ©couvrir ensemble la face immergĂ©e.
Fasten your bouĂ©e, weâre about to take off.
snack break - on đĄ
Avant de se lancer Ă lâeau, petit point gĂ©ographie.
Si tu as besoin dâun rappel â I know I did â, la Guyane est une ancienne colonie française situĂ©e en AmĂ©rique du Sud2. Depuis la dĂ©colonisation et sa dĂ©partementalisation en 1946, elle fait partie intĂ©grante de la FOM (France dâoutre-mer).
Historiquement, la Guyane est surtout connue pour :
â Sa forĂȘt amazonienne â qui couvre une grande partie du territoire.
â Son bagne â ouvert entre 1795 et 1953 (Oui oui, tu as bien lu, câest super rĂ©cent.)
â Son centre spatial, ouvert en 1965, duquel lâEurope tire la plupart de ses fusĂ©es aujourdâhui.
⊠Sans oublier certain·es ressortissant·es comme Christiane Taubira ou Gaston Monnerville â mais on en reparle plus tard !
Maintenant quâon nage tous·tes dans les mĂȘmes eaux, letâs go.
snack break - off đĄ
đ se donner le temps de se former
Une grande partie de notre conversation a tourné autour de sa construction personnelle.
Pour commencer lâinterview, jâai bien Ă©videmment posĂ© la question rituelle : « quand tu Ă©tais plus jeune, tu voulais faire quoi et/ou devenir qui ? »
Quand j'étais plus jeune, je suis passée par plein de stades.
J'ai voulu ĂȘtre astrophysicienne parce que je suis une passionnĂ©e de l'univers. Je tiens aussi ça de ma mĂšre. Elle aime beaucoup tout ce qui touche Ă l'astronomie et aux Ă©toiles. Elle m'apprenait le nom des Ă©toiles dans le ciel, leur histoires, etc. donc j'ai voulu devenir astrophysicienne, puis gĂ©ologue.
AprĂšs j'ai trĂšs vite compris que ça ne consistait pas qu'Ă regarder des Ă©toiles et dĂ©couvrir des planĂštes, mais aussi Ă beaucoup passer du temps dans un bureau ou Ă faire des calculs⊠CâĂ©tait un peu moins cool.
Jâavais aussi un cĂŽtĂ© geek. Avec l'arrivĂ©e d'internet, je traĂźnais sur des forums et sur le site du zĂ©ro (devenu OpenClassrooms) pour apprendre Ă coder. Mais je ne pensais pas du tout Ă en faire une carriĂšre. Ă la fois parce que les Ă©coles de code comme 42 nâexistaient pas⊠et parce que je ne me reconnaissais pas dans lâimage du geek vĂ©hiculĂ©e Ă lâĂ©poque.
Enfin, je ne savais pas trop quoi faire de ma vie, vu que les passions ou les projets que j'avais â au final â je ne voulais pas trop les concrĂ©tiser. Alors mon parcours sâest plutĂŽt fait au fil de l'eau.
Câest marrant, vu de ce quâon sâĂ©tait dit et mes recherches, j'avais vraiment projetĂ© des envies littĂ©raires, alors que l'astrophysique, la gĂ©ologie, ou la tech, c'est des choses beaucoup plus scientifiques â et super rigoureuses.Jâai passĂ© un bac S, tout en Ă©voquant beaucoup toutes les matiĂšres littĂ©raires, donc la philo, etc.
J'Ă©tais trĂšs bavarde, je suis toujours, je pense, trĂšs bavarde. Et donc quand j'Ă©tais petite, on n'arrĂȘtait pas de me dire, mais toi tu finiras avocate, c'est pas possible, tu aimes trop parler. [rires]
Câest donc de lĂ que vient cette vocation [rires]
đđŸ Pour rappel, si tu souhaites soutenir le mĂ©dia â câest la meilleure maniĂšre dâassurer sa pĂ©rennitĂ© et me permettre de payer mes sĂ©ances piscine â, tu peux :
â Rejoindre le Spa â lâespace de contenu additionnel de la Ploufletter. Tu y trouveras un condensĂ© ma veille (sous forme de rĂ©sumĂ©s et analyses de livres) et des templates introspectifs.
â Ou bien faire un don libre sur Stripe.
đ grandir pour partir
Pendant notre Ă©change, je comprends que, dĂšs sa jeunesse, MĂ©lanie sâacculture Ă lâĂ©loignement familial comme faisant partie intĂ©grante de son parcours.
Ă lâinstar des romans dâapprentissages du XIXĂšme â les fameux â oĂč les protagonistes se construisent avec le dĂ©sir de quitter leur ville natale pour Paris, MĂ©lanie grandit avec la certitude quâelle finira tĂŽt ou tard par traverser lâAtlantique pour poursuivre sa formation.
Dâailleurs, jâai Ă©tĂ© frappĂ©e de voir que lâultra-centralisation du savoir et du pouvoir existait aussi Outre-Atlantique.
En fait, nous n'avions pas d'autre choix que de partir.
J'ai grandi en Guyane, j'ai fait toutes mes Ă©tudes en Guyane, j'ai passĂ© mon bac lĂ -bas, mais je savais que j'allais venir Ă Paris pour les Ă©tudes. Les filiĂšres que je souhaitais suivre n'existaient pas en Guyane3. L'offre de formation n'Ă©tait pas la mĂȘme quâaujourd'hui.
C'Ă©tait assez courant de partir Ă Bordeaux ou Montpellier pour suivre ses Ă©tudes. Pour ma part, jâavais 17 ans au moment de quitter la maison. Comme jâavais de la famille proche Ă Paris, jây suis allĂ©e. (Je ne me sentais pas capable d'ĂȘtre vraiment "seule" dans une autre ville que la mienne Ă ce moment.)
Et comme je ne savais pas ce que je voulais faire, j'ai fait une classe préparatoire en hypokhùgne puisque je me suis dit ben ça sera l'occasion de peaufiner ma culture générale.
J'adore lire des livres, donc pendant un an, je vais continuer Ă apprendre plein de choses. Et puis, peut-ĂȘtre que l'annĂ©e d'aprĂšs, je saurais ce que je veux faire de ma vie. Spoiler, je ne savais pas.
Je vois tout Ă fait. J'avais le mĂȘme plan de vie. [grimace]
Jâai dĂ©posĂ© un dossier Ă la Sorbonne en droit. J'ai Ă©tĂ© prise et je me suis dit : bah Ă©coute, pourquoi pas ? Comme on me disait que jâallais finir avocate, ça serait marrant et ça mâamĂšnera peut-ĂȘtre Ă faire du droit.
Mais en vrai mon annĂ©e de prĂ©pa m'a Ă©normĂ©ment aidĂ©e parce qu'on ne se rend pas compte de toute l'offre qu'on peut avoir Ă disposition quand on grandit Ă 8 000 km. Ăa mâa permis de dĂ©couvrir l'Ă©cosystĂšme et la culture parisienne aussi â parce que c'est toute une autre histoire ! Je ne parlais pas du tout lâargot par exemple.
La premiĂšre fois que quelqu'un m'a dit : « On va grailler un truc ? J'ai trop la dalle », jâai pas compris. Jâai dit : « Alors attends, pardon, est-ce que tu aurais un autre mot s'il te plaĂźt ? » [rires]
Donc le temps de m'acclimater à tout ça, il me fallait bien un an. AprÚs, je me sentais beaucoup plus à l'aise parce que j'étais déjà sur place.
Ha ok ! C'est une année prépa mais de tout.
Je l'ai vraiment vĂ©cu comme une annĂ©e bonus dans ma vie.Je n'ai pas sautĂ© de classe, mais je suis rentrĂ©e Ă l'Ă©cole en avance. Jâai une sĆur qui a deux ans de plus que moi. Quand elle est rentrĂ©e Ă l'Ă©cole, ça a Ă©tĂ© un drame pour moi qu'on soit sĂ©parĂ©s⊠et surtout qu'elle apprenne plus de choses que moi ! Je passais ma journĂ©e Ă la crĂšche et du coup, j'avais trop envie d'aller Ă l'Ă©cole.
Donc, comme jâĂ©tais une petite fille trĂšs tĂȘtue, j'en parlais tous les jours Ă ma mĂšre et aux maĂźtresses de ma sĆur. Au bout d'un moment, ils ont acceptĂ© que je rentre l'annĂ©e d'aprĂšs.
Je me disais, dans tous les cas, j'ai un an d'avance : autant utiliser cette annĂ©e pour moi, pour acquĂ©rir plus de culture g et en profiter pour voir un peu plus clair sur oĂč je veux aller dans la vie.

đĄ français·e jusquâau bout des palmes - dĂ©couvrir lâaltĂ©ritĂ©
Pendant la discussion, MĂ©lanie mâa mise face Ă mes biais. (Une belle leçon dâhumilitĂ©.)
â Ăa a commencĂ© par une rĂ©flexion dâouverture de ma part : « Des fois j'ai du mal Ă conscientiser que la Guyane fait partie du territoire français ».
â Avant de poursuivre avec lâemploi de : « la mĂ©tropole / la France mĂ©tropolitaine ».
Câest Ă Ă ce moment que MĂ©lanie mâa repris : « Nous, on dit France hexagonale ».
âđŸ De fait, la rĂ©fĂ©rence à « la mĂ©tropole » renvoie au passĂ© colonial de la France.
Ă cette Ă©poque, toutes les institutions dĂ©cisionnaires Ă©taient centralisĂ©es Ă Paris et « ruisselaient » ensuite sur les colonies. (Devenues pour certaines les DROM-TOM.) Spoiler alert, ça nâa pas tant changĂ©. Dis toi que câest seulement en 2018 quâun amendement a Ă©tĂ© dĂ©posĂ© pour remplacer le terme « mĂ©tropole » par « hexagonale » dans la Constitution.
Six ans. Six petites années.
Câest fou non ?
Et, sans le savoir, ces remarques introduisaient à merveille le sujet suivant. Soit, les micro-agressions, le racisme, et la présomption de non-appartenance à la nation Française que Mélanie a découvert en arrivant à Paris.
On est à 8 000 km en Amérique du Sud, donc dans un endroit qui n'a rien à voir avec une façon de vivre aussi qui n'a rien à voir, des saisons qui n'ont rien à voir. Mais pour autant, on est un bout de la France, on est européen·nes et, d'ailleurs, pendant les études on part faire Erasmus, on va pas au Brésil ou autre.
Bref, moi quand j'arrive, je viens déjà souvent à Paris, je suis française, je me suis jamais posée la question de est-ce que je suis française ou pas ? Et je me prends un truc la premiÚre année... Heureusement, jamais de la part de mes camarades de prépa.
Peut-ĂȘtre que comme je disais que je « venais d'arriver », ça projetait un imaginaire Ă©tranger dans la tĂȘte de certaines personnes.
Mais la Guyane, c'est français, c'est un dĂ©partement français. Nous, on Ă©tudie la gĂ©ographie de la France, l'histoire de la France. Par contre je suis pas sĂ»re que lâinverse soit vrai.
Encore une fois, la premiÚre année j'ai beaucoup entendu : « ha mais pour quelqu'un qui vient d'arriver, tu parles vachement bien le français. »
Plein de réflexions qui montraient que les gens ne connaissaient ab-so-lu-ment pas la Guyane. D'ailleurs, 90% des personnes à qui je parle pensent que la Guyane est une ßle. Spoiler, ce n'est pas une ßle4.
Je me disais, : « Mais, yâa quoi que vous comprenez pas dans « Guyane française » ? Je vous donne un indice dans le nom. » Et mĂȘme si je le donnais pas, si tu connais les dĂ©partements français, t'es censé·e connaĂźtre la Guyane.Ăa ne mâest arrivĂ© que la premiĂšre annĂ©e Ă Paris, puis en droit. Aucune de ces rĂ©flexions nâĂ©tait mĂ©chante. CâĂ©tait plutĂŽt de lâignorance. Peut-ĂȘtre quâaprĂšs ça a stoppĂ© parce que je ne le prĂ©sentais plus de la mĂȘme maniĂšre.
Ăa mâa fait rĂ©aliser que les gens ne connaissaient pas l'endroit dâoĂč je venais.
De ce moment je retiens cinq choses :
â Check your biaises5. (Ătre concernĂ©e nâimmunise en rien.)
â DĂ©construire â et reconstruire â nos rĂ©flexes est un processus continu.
â En termes de micro-agression, lâintention crĂ©e le larron â autant que la rĂ©pĂ©tition.
â Quoiquâon en dise, notre rapport aux DROM-TOM traduit encore le relent de colonialisme.
â Si lâon veut se renseigner sur un sujet, (se taire et) Ă©couter les personnes concernĂ©es reste la meilleure chose Ă faire.
đđŸ Si cette question de la place des Outre-Mer en France tâintĂ©resse, on avait dĂ©jĂ parlĂ© de la crise hydrique Ă Mayotte â consĂ©quence directe du rĂ©chauffement climatique â dans une Ă©dition prĂ©cĂ©dente.
đ€ż et toi, « tu viens dâoĂč ? »
Une des questions qui me dĂ©range le plus, câest la fameuse « tu viens dâoĂč ? »
Ayant toujours Ă©voluĂ© dans des milieux relativement homogĂšnes, je ne compte plus le nombre de fois oĂč je me suis retrouvĂ©e Ă bĂ©gayer une explication sans dĂ©voiler mon histoire personnelle, justifiant ma prĂ©sence dans x/y lieu, sans connaĂźtre mon interlocuteur·rice. Et jâai captĂ© rĂ©cemment que lâaccumulation de ces micro-violences Ă©rodaient ma confiance â comme les annĂ©es les montagnes.
Ă lâinverse, jusquâĂ ses 18 ans, MĂ©lanie nâa jamais Ă©tĂ© confrontĂ©e Ă cette question et a grandi dans un environnement â vraiment â multiculturel.
Sâil semble anodin de prime abord, ce dĂ©tail a participĂ© Ă forger sa confiance â que je travaille toujours Ă dĂ©velopper â et son rapport au racisme.
Jâai toujours pris la question sur le ton de l'humour, surtout sur les petites remarques qui pouvaient ĂȘtre un peu dĂ©sobligeantes.
Par exemple, pendant mes trois annĂ©es de fac, quand le prof faisait l'appel quand on Ă©tait en petit groupe, j'Ă©tais la seule personne Ă qui on demandait d'oĂč elle venaitâŠAlors que t'avais plein de personnes qui avaient des noms Ă consonance Ă©trangĂšre dans la piĂšce.
Au début je disais « Guyane ». Et aprÚs une semaine comme ça, ça te saoule. Parce que c'est la répétition qui saoule.
Donc je disais que je venais du Japon. Je répondais « Okinawa. Au Japon » et je regardais le prof.
Je voyais bien qu'il avait un blanc, parce que c'Ă©tait pas la rĂ©ponse Ă laquelle il s'attendait. Et je continuais en disant : « Franchement, c'est super sympa, je suis trĂšs contente d'ĂȘtre arrivĂ©e Ă Paris, le Japon me manque un peu mais je vais mây faire. » Jây allais Ă fond.
J'adore ! Je note le tip pour les prochaines fois. Et est-ce que tu vois quand les gens te posaient la question, est-ce que c'Ă©tait... Est-ce qu'on t'avait dĂ©jĂ parlĂ© de racisme quand tu Ă©tais plus jeune ? Est-ce que tu savais que c'Ă©tait une rĂ©alitĂ© ? Comment on t'avait acculturĂ© à ça ?Pour en avoir discutĂ© avec des amis racisé·es6 qui ont vĂ©cu toute leur vie en France hexagonale, je pense que j'ai Ă©tĂ© trĂšs protĂ©gĂ©e du racisme, de toutes ces petites remarques dĂ©sobligeantes, et de toutes les fois oĂč on te fait sentir que t'appartiens pas forcĂ©ment au groupe.
En fait, jâai grandi dans un endroit qui est un vĂ©ritable melting pot, avec plein de cultures qui se rencontrent, qui Ă©changent ensemble. J'ai des amis d'enfance qui viennent de partout. OĂč on s'enrichit tous de nos diffĂ©rentes cultures.
Avant d'arriver Ă Paris, le racisme mâĂ©tait inconnu. Je me souviens qu'une fois, en prĂ©pa, un prof mâa dit « Ah, mais on vous apprend pas Ă faire des dissertations, en Guyane. » Genre, je sais pas, il a jamais dit Ă un Ă©lĂšve qui venait de Toulouse « Ah, mais on vous apprend pas Ă faire des dissertations en Toulouse. »
Olala
AprĂšs, ce ne sont pas des choses qui m'ont fragilisĂ©e ou fait questionner mon identitĂ©. Je me disais plus « Mais câest ridicule de penser comme ça. »
Avec lâexpĂ©rience et les Ă©changes, aujourdâhui MĂ©lanie parvient Ă mettre des mots sur les choses. Toutefois, pendant la discussion, elle insiste sur caractĂšre insidieux de certains propos ou situations dĂ©routantes : « Tu ne mets pas forcĂ©ment des mots lĂ -dessus ». Cet apprentissage terrain, on le retrouve aussi dans la construction progressive de sa rĂ©partie.
Au début, la surprise lui impose le silence ; tandis que désormais, la réponse fuse immédiatement.
Aujourd'hui, je réponds aux personnes qui me font des remarques racistes.
Un mec m'a déjà dit à la fin d'une soirée que c'était à moi de nettoyer la piÚce car j'étais noire, donc la « femme de ménage du groupe ». Je l'ai trÚs froidement remis à sa place en lui disant que c'était la premiÚre et derniÚre fois qu'il me parlait comme ça.
Jâai coupĂ© tout contact avec lui et les personnes qui avaient entendu sa remarque et continuĂ© de le cĂŽtoyer.
Et puis, je me dis aussi « Vous nâaurez pas ma joie, et je refuse dâĂ©voluer dans votre vision de la sociĂ©tĂ©. »
Au-delĂ des remarques, MĂ©lanie a dĂ©couvert les biais par lâexpĂ©rience â au recrutement, en entreprise, etc. Et, fidĂšle Ă son mode de fonctionnement (« Mais câest ridicule de penser comme ça »), elle a trouvĂ© comment tirer son Ă©pingle du jeu.
Si tu savais le nombre de refus que je me suis pris au moment de postuler en Master 2. LĂ oĂč, Ă deux Ă©quivalents â parce que forcĂ©ment avec nos amis on se parle â, ou alors mĂȘme des dossiers moins bien que le mien Ă©tait acceptĂ©. Alors que jâai fait mes quatre ans de scolaritĂ© Ă la Sorbonne sans redoubler, rien.
J'ai un ami qui, lui, avait redoublĂ© â il Ă©tait en train de repasser ses partiels au moment de postuler : il a Ă©tĂ© pris dans des cursus, alors qu'il n'Ă©tait mĂȘme pas sĂ»r de valider son annĂ©e⊠Alors quâon me disait « non ».
Alors ok, pas de soucis, pas de problĂšme, jâai juste candidatĂ© Ă plus d'endroits ; et j'ai jamais pris un non pour un non.
D'ailleurs, je ne l'ai jamais dit ouvertement, mais au dĂ©part, je nâavais pas Ă©tĂ© prise dans le master 2 que jâai fait. Je le voulais absolument. J'ai profitĂ© de l'Ă©tĂ© pour faire un stage Ă la SociĂ©tĂ© du Grand Paris qui construit tous les mĂ©tros de la ville, et je me suis pointĂ©e le jour de la rentrĂ©e.
Jâai dit « voilĂ , je m'appelle MĂ©lanie Dinane, jâai pas Ă©tĂ© prise sur dossier mais j'ai vraiment trĂšs envie de votre master pour telle et telle raison. J'ai passĂ© l'Ă©tĂ© Ă faire des stages dans des structures, peut-ĂȘtre que ça appuiera aussi ma candidature.
Et si aujourd'hui dans la promo que vous avez, il y a des gens qui ne sont pas venus, ou si vous avez une place en plus, je suis prĂȘte Ă la prendre ».Le directeur du master a Ă©tĂ© surpris de ma dĂ©marche, il m'a dit : « pas de souci, Ă©coutez, on va faire la rentrĂ©e, je vous laisse attendre et puis je verrai en fonction des Ă©lĂšves aussi qui sont prĂ©sents. » Ă la fin de la journĂ©e, jâĂ©tais prise.

Une fois ses Ă©tudes terminĂ©es, MĂ©lanie a aussi appris Ă naviguer les stĂ©rĂ©otypes nĂ©gatifs dans le monde du travail. Dâabord dans le droit, puis, dans lâentrepreneuriat â en tant que cofondatrice dâune startup tech puis dâune communautĂ© dâentrepreneuses. (Goldup par The Family)
« Quand j'étais avocate, je me disais : « Tu es surpris, tu as tes préjugés, ok. Mais ça va plus jouer contre toi que contre moi. »
Par exemple, j'ai beaucoup fait de business development et de sales, ça mâest aussi arrivĂ© dâĂȘtre face Ă des gros clients pour faire des nĂ©go, et il y a parfois de la misogynie dans le milieu.
Mais moi, je sais que je suis une trĂšs bonne avocate. Ou alors je sais que je suis une trĂšs bonne sales et que je vais te convaincre. [rires]
Jâadore ! [rires] Câest tellement sage.Donc, prends moi pour ce que tu veux. Je vais te regarder avec un grand sourire. Et Ă la fin de la journĂ©e, moi, j'aurais fait mon taf. Et toi, tu te serais laissĂ© avoir par tes prĂ©jugĂ©s.
Dans un de mes anciens emplois on m'a déjà dit, « mais oui, je t'ai déjà croisée, toi t'es à l'accueil ». Et non ! Je gÚre le business development et aujourd'hui on va renégocier un contrat, bonjour.
Ah c'est fou ce prĂ©jugĂ©. Moi ça mâest arrivĂ© quâon me confonde avec la seule autre personne noire de lâentreprise⊠mĂȘme si on avait rien en commun.
Oui, on en a jamais fini. En fait, ton préjugé c'est ton problÚme, c'est pas le mien.
Sâhabituer au fait dâĂȘtre le seul / la seule, c'est aussi faire la paix avec son individualitĂ©. Et parfois, ça donne de belles surprises !
Je sais que dans tous les cas, je vais dĂ©toner dans la piĂšce. Donc autant dĂ©toner avec mon afro [âŠ]. En plus, en Ă©tant moi-mĂȘme, je suis beaucoup plus Ă l'aise, donc je performe beaucoup plus dans ce que je fais. Alors go en fait.
Quand jâavais ma boĂźte j'Ă©tais beaucoup Ă la DĂ©fense. Jâavais un afro, pas comme un cadre en costard. Et bizarrement, les gens Ă©taient plutĂŽt contents et aimables.
Ho, la DĂ©fense, câest vraiment ma dĂ©finition de lâenfer sur terre. Mais je me suis dis la mĂȘme chose avec mes cheveux [rasĂ©s Ă lâĂ©poque]. Jâai Ă©tĂ© la seule du groupe Ă passer le pas et, bon, cheveux ou pas cheveux, de toute façon les gens voient la diffĂ©rence. Donc jâai lĂąchĂ© lâaffaire pour me balader en baskets.Et mine de rien, ça fait le tri. C'est comme ta photo sur le CV, ça te permet de faire un tri aussi des personnes avec qui tu Ă©changes, avec qui tu te sens Ă l'aise.»
Long sĂ©ance de natation short, voici ses recos pour rĂ©pondre en cas de remarque dĂ©sobligeante ou prĂ©jugĂ© discriminant â
đđŸââïž Identifier la personne problĂ©matique du groupe.
đđŸââïž RĂ©pondre par lâabsurde â et pousser la rĂ©ponse au bout.
đđŸââïž Poser ses limites tout de suite â afin de crĂ©er un prĂ©cĂ©dent.
đđŸââïž Retourner la tendance Ă son avantage. (Au travail, en soirĂ©e, ou ailleurs.)
đđŸ Pour rappel, si tu souhaites soutenir le mĂ©dia â câest la meilleure maniĂšre dâassurer sa pĂ©rennitĂ© et me permettre de payer mes sĂ©ances piscine â, tu peux :
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â Ou bien faire un don libre sur Stripe.
đŠÂ« sâil lâa fait, pourquoi pas moi ? »
Ou : le pouvoir de la représentation.
Il y a bientĂŽt deux ans, jâavais Ă©changĂ© avec Jasmine Touitou sur la construction de nos rĂȘves et ambitions7. Sa thĂšse Ă©tait claire comme de lâeau de roche :
« On rĂȘve Ă la hauteur de ce que lâon connaĂźt. »
Sous-entendu : il est nĂ©cessaire de diversifier nos imaginaires avec de nouvelles histoires, figures dâautoritĂ©, et parcours de nage ⊠à lâimage des personnes qui composent la sociĂ©tĂ© dans laquelle on barbote.
Ce tant pour : voir son expĂ©rience validĂ©e, se sentir valorisé·e en tant quâindividu appartenant Ă un groupe social donnĂ©, et lĂ©gitime Ă prendre sa place. Dans ce cas, la question de la reprĂ©sentation est centrale â et son manque, fatal.
Câest dâailleurs en ce sens que des pros de lâinclusion comme Ruchika Tulshyan et Jodi-Ann Burey critiquent le « syndrome de lâimposture » dont lâapproche consiste dâabord Ă blĂąmer les individus â avant dâanalyser les dynamiques sociales qui engendrent ce manque de confiance8 (Source : HBR, 2021).
Tout ce que je te dis ici, je le savais⊠en théorie.
Câest lorsque MĂ©lanie mâa parlĂ© de son enfance oĂč elle a grandi entourĂ©e de modĂšles â qui lâaident Ă se projeter dans une « grande » carriĂšre â que jâen ai pris la mesure. (Et une certaine forme de seum9 il est vrai.)
« Moi, je me suis construite dans un modĂšle oĂč les gens qui passaient Ă la tĂ©lĂ© me ressemblaient aussi. Il y avait toutes sortes de reprĂ©sentations. Ă lâĂ©poque â je suis un peu une vieille aujourdâhui â on avait Canal satâ, tout le satellite, et trois chaĂźnes locales et rĂ©gionales.
Et bon, quand on te parle de l'actualité, c'est l'actualité qui se passe en Guyane donc la plupart des personnes que tu vois te représentent.
En plus, jâai une chance supplĂ©mentaire : j'ai fait du droit. Donc jâai deux grands modĂšles. »
gaston monnerville
Le premier, câest la figure de Gaston Monnerville dont le dĂ©but de parcours rappelle â Ă quelques annĂ©es prĂšs â celui de MĂ©lanie. (Je dis « Ă quelques annĂ©es prĂšs » car lâhistoire de Gaston commence au dĂ©but du XXĂšme siĂšcle, Ă lâĂ©poque oĂč les DROM ont encore le statut juridique de colonies. Son chapitre existentiel se clĂŽture en 1991 â oĂč celui de MĂ©lanie sâouvre.)
Guyanais et Cayennais dâorigine, Gaston traverse lâAtlantique au lycĂ©e pour Ă©tudier Ă Toulouse oĂč il devient avocat. AprĂšs une carriĂšre-Ă©clair au pays de la chocolatine, il rejoint Paris en 1921 pour exercer avant de se lancer dans une carriĂšre politique dix ans plus tard.
Dâabord dĂ©putĂ© de la Guyane puis sous-secrĂ©taire dâĂtat aux Colonies sous la TroisiĂšme RĂ©publique, Gaston enchaĂźne les rĂŽles jusquâĂ prendre la prĂ©sidence du Conseil de la RĂ©publique sous la QuatriĂšme RĂ©publique et du SĂ©nat sous la CinquiĂšme. Au-delĂ de ces rĂŽles prestigieux, Monnerville a failli briguer le poste de PrĂ©sident de la RĂ©publique Ă deux reprises â mais en est Ă©cartĂ© de part sa couleur de peauâŠ
« Quoiquâil en soit, j'ai en modĂšle un avocat brillant qui a son portrait au tribunal de Paris. Et quand j'ai prĂȘtĂ© serment, j'ai pris son portrait parce que c'est un trĂšs beau symbole pour moi. »
christiane taubira
Son deuxiĂšme modĂšle, tu le connais forcĂ©ment : câest Christiane Taubira ! Lorsque MĂ©lanie arrive Ă Paris, Christiane est encore Garde des Sceaux et Ministre de la Justice.
Aujourdâhui, MĂ©lanie continue de se nourrir de ces personnalitĂ©s aux identitĂ©s et aux parcours divers donner de lâimpulsion Ă son parcours de nage.
Parmi celles-ci, elle nomme notamment Bozoma Saint John. Ancienne CMO de Netflix et dâApple Music, Bozoma a su sâimposer sur la scĂšne tech au point de rĂ©aliser une keynote Ă la maniĂšre de Steve Jobs en 2016. Et puisque Bozâ nâest pas Steve, celle-ci a choisi de marquer sa diffĂ©rence⊠en faisant rapper10 les dĂ©veloppeurs11.
bonus : sa mĂšre
Enfin, son dernier modĂšle dâinspiration, câest quelqu'un de son entourage : sa mĂšre.
Celle-ci a passĂ© de nombreux concours pour franchir des Ă©chelons ou changer de mĂ©tier. (Elle commencĂ© sa carriĂšre en Ă©tant institutrice en maternelle et travaille aujourd'hui pour le ministĂšre de l'intĂ©rieur.) Comme MĂ©lanie aujourdâhui, elle Ă©volue avec brio dans un milieu trĂšs masculin !
đđŸ Si la question des role models te parle, je tâinvite Ă aller plonger Ă la dĂ©couverte de Lily Singh, de Riz Ahmed ou encore de Sarah Oirdighi qui parlaient de lâimportance dâavoir un miroir pour se construire. (Oui, je vais prĂ©tendre que je les ai tous·tes rencontrĂ©.)
Je tâinvite aussi Ă plonger dans la Ploufletter sur le rĂŽle que peut jouer ton entourage dans un parcours de nage.
đ quatre tips pour prendre ta place
Avant de clĂŽturer l'Ă©change, jâai demandĂ© Ă MĂ©lanie quelques tips Ă partager avec toi pour construire son parcours de nage et prendre sa place. Les voici ! (Tous sont tirĂ©s de son expĂ©rience) đđŸ
đđŸââïž câest ok de ne pas plaire Ă tout le monde.
â « Ne pas essayer de forcer les choses. Il y a des fois oĂč on va se sentir mal Ă l'aise, et c'est pas grave. On peut-ĂȘtre le dire ou se demander : « mais en fait, pourquoi je me sens comme ça ? »
On a toujours envie de se sentir super accepté·e partout, mais il y a peut-ĂȘtre des gens avec qui ça ne matchera pas. Tu sais, avant, j'avais tout le temps envie que ça se passe bien avec tout le monde. Et en fait, il y a des gens que moi, je n'aime pas. Et bizarrement, ces gens-lĂ , ils ne m'aiment pas aussi. Et câest ok ! »
đđŸââïž puise ta confiance dans les parcours de tes pairs.
â « Une fois en cours, jâĂ©tais assise Ă cĂŽtĂ© dâun ami et le prof nous rendait nos rĂ©sultats de contrĂŽle. Je crois que j'avais eu 9. Le mec me dit, mais comment c'est possible que t'aies pu avoir 9? C'Ă©tait tellement facile. Et lĂ , la prof lui a rendu sa copie : le mec avait eu 6.
Et des fois, quand je n'ai pas confiance en moi, je repense à ces gens-là et je me dis : « lui, s'il allait passer l'interview à ma place aujourd'hui, il aurait 6 000 fois plus confiance en lui. »
Tu vois, j'ai ce truc de me dire, « ok, lui, qu'est-ce qu'il ferait ? Comment il se comporterait à cette interview ? Et si lui se comporterait comme ça alors que je sais que je suis meilleure que lui, alors je peux avoir la confiance d'y aller et de bien le faire. » »
đđŸââïž trouve ta communautĂ© â ou crĂ©e la.
â « Je n'ai jamais vraiment trouvĂ© l'Ă©cosystĂšme qui me convenait pour plusieurs raisons. Du coup, je l'ai créé. »
đđŸââïž nourris ton individualitĂ© au quotidien.
â Dans les moments de down, MĂ©lanie suit Ă la lettre les conseils de sa queen (Badass Boz) : elle tapisse son chez soi avec des post-its remplis de phrases encourageantes. Parfait pour se donner du baume au cĆur au quotidien et sâauto-saucer.
Mais, quoiquâil arrive, elle me rappelle trĂšs justement que « quand on ne se sent pas bien, on peut aussi aller voir un·e pro. Rien ne remplace un psy ».
đ so what ?
Perso, cet Ă©change mâaura appris un truc. Loin dâĂȘtre une question dâĂ©tat dâesprit only, avoir confiance en soi repose avant tout sur le milieu social / Ă©conomique dans lequel on Ă©volue.
Depuis, jâai repensĂ© Ă la notion d'alter ego (la fameuse What would Laure Manau-do ?) en mâinterrogeant : comment me percevrais-je si ma place nâavait jamais Ă©tĂ© remise en question ?
Tu tâen doutes, je suis encore loin dâavoir la rĂ©ponse, mais ça mâintrigue.
Et toi, ça tâinspire quoi ?
đ ïž quelques ressources pour aller plus loin
Si tu souhaites pousser lâexploration, voici quelques ouvrages ou figures dans lesquelles jâai piquĂ© une tĂȘte pour prĂ©parer cette Ploufletter :
đđŸââïž La France dâoutre-mer par Jean-Christophe Gay, 2021.
đđŸââïž Codes noirs - De lâesclavage Ă lâabolition â prĂ©facĂ© par Christiane Taubira.
đđŸââïž Le numĂ©ro mai-juin 2023 Les dĂ©fis des outre-mer du magazine Cahier français.
đđŸââïž Et la figure de Lilian Thuram que jâai dĂ©couvert cet Ă©tĂ© dans le magazine LĂ©gende dĂ©diĂ© Ă Angela Davis puis dans cet Ă©pisode de podcast par France Culture.
Ăa tâa plu ? Fais passer le mot ! (Ăa mange pas dâalgue et ça aide full.)
See you soon au bord du bassin đ
Apolline
Tu peux aussi nous retrouver sur instagram : https://www.instagram.com/lapiscine_media/
En français : « travail en cours »
Je lâai successivement placĂ©e au Groenland, en AmĂ©rique Centrale PUIS, enfin, en AmĂ©rique du Sud. Mais bref, si tu veux en lire plus, France Culture y avait dĂ©diĂ© une Ă©mission
La filiĂšre que MĂ©lanie voulait suivre a ouvert lâannĂ©e de son dĂ©part⊠aprĂšs les pĂ©riodes de vĆux post-bac.
Autre exemple : la premiĂšre annĂ©e de mĂ©decine a ouvert la mĂȘme annĂ©e, mais uniquement en visio avec les Antilles. Câest une catastrophe : seulement deux inscrits ont rĂ©ussi le concours cette annĂ©e-lĂ . Dis toi que la possibilitĂ© de suivre la deuxiĂšme annĂ©e en Guyane est apparue en...2023
(Ces précisions ont été fournies par Mélanie Dinane)
Je nâai pas osĂ© le dire mais jâai longtemps fait partie de ces personnes đŹ
En français : « Prends conscience de tes biais (et privilÚges) »
Et, pour ce faire tu peux te plonger dans lâexercice de la roue des privilĂšges qui permet de se situer et mieux comprendre les enjeux qui nous touchent (ou non).
Racisé·e signifie : subir un processus de racialisation.
Voici un article de BePax qui en parle plus en dĂ©tail si le sujet tâintĂ©resse.
Oui, certains articles ont plus dâun an dâincubation. Mais ils nâen sont que plus chouettes une fois sortis đ
Puisque, outre lâambition, la force de caractĂšre, etc., les micro-agressions / les remises en question constantes / discriminations jouent dans lâauto-perception des femmes (et autres personnes minorisĂ©es). Source : Stop Telling Women They Have Imposter Syndrome, pour le Harvard Business Review, 2021
« Avoir le seum » signifie : ressentir une forme dâamertume, de colĂšre ou d'envie. Le terme serait dĂ©rivĂ© de lâarabe summ qui signifie « venin ». (Source : Palais de Tokyo)
Pour les curieux·ses ou aspirant·es rappeur·ses, la chanson câĂ©tait Rapperâs Delight.
Ce terme est volontairement genré au masculin.